20 Mai 2022
….. peut-être ne pâlis tu pas,
et peut-être te vouvoies tu, n’est-ce pas ?
Quand dans un rade
du petit port de la Désirade
tu te souviens un peu ivre
de fatigue et de poésie, de ce livre
qui avait mené ton âme pérégrine
jusqu’aux confins de la Bucovine,
où tu avais succombé aux charmes d’une Argentine
stripteaseuse vêtue de lamé platine
qui sur deux lames patinait merveilleusement -
croyais-tu - pour toi seul amoureusement,
Sous le dernier phare
qui éclairait la gare
Abyssinienne à Harar,
où s’était posé ton errant destin,
en quête de perlimpinpin.
Voyager à Boston avec Jean François Duval,
partir avec Blaise Cendrars dans l’Oural,
rejoindre Ceslaw Milosz à Cracovie,
dans la maison bourgeoise où je vis
en relisant Marcel Thiry….
Moi qui ne pâlis plus au nom de Vancouver.
Toi qui pâlis au nom de Vancouver
Tu n’as pourtant fait qu’un banal voyage ;
Tu n’as pas vu les grands perroquets verts,
Les fleuves indigo ni les sauvages.
Tu t’embarquais à bord de maints steamers
Dont par malheur pas un ne fit naufrage,
Sans grand éclat tu servis sous Stürmer,
Pour déserter tu fus toujours trop sage.
Mais il suffit à ton orgueil chagrin
D’avoir été ce soldat pérégrin
Sur le trottoir des villes inconnues,
Et, seul, un soir, dans un bar de Broadway,
D’avoir aimé les grâces Greenaway
D’une Allemande aux mains savamment nues.