8 Mai 2021
Vous êtes déjà passé dans ces pays de propreté,
de vert,
au- dessus de Vevey,
en allant à Gruyère,
ou bien dans le Val de Travers,
boire l’absinthe,
vous êtes passé à côté de la ferme où habitait Gustave Roud,
qui savait voyager à pied,
comme ces paysans de la montagne qui n’avaient que peu quitté leur région, mais
dont les descendants comptent qu’en plusieurs fois vingt ans de vie active ils
avaient parcouru, en marchant, plus de dix fois le tour de la terre,
en reconnaissant chacun des cailloux,
et chaque touffe de vipérine ou d’anémone-sylvie,
du bord de ces chemins qui ne conduisent nulle-part,
dont on n’est même pas sûr que nous puissions sauver le souvenir pour,
‘ces fins du temps où il n’y aura plus de jours’.
Que nous allions au bord de la Mer Morte ou dans ce Haut-Jorat
qui lui ressemble,
jusqu’à son nom: la Plaine Morte,
nous marcherons,
comme lui,
‘avec une absence de précaution qui est la seule précaution à prendre, dessiner
par avance son itinéraire -imprudence extrême !’
Rimbaud est là, invisible compagnon de ce marcheur qui ne recherche ni dans sa
marche ni dans ses mots le regard des autres,
avec lui, avec eux, découvrons que ‘nous valons plus que nos rêves’…
Lire Gustave Roud, c’est aussi connaître le plaisir de découper - c’était quand la dernière fois ? - les pages des trois volumes de ses écrits.
On le lit en marchant dans ces montagnes de plaine avec un morceau de gruyère et un déci d’un de ces vins blancs du canton de Vaud.
Gustave Roud 20 Avril 1897 – 10 Novembre 1976
Les citations sont extraites de Petit Traité de la marche en plaine,Scène, Air de la Solitude.
Ecrits (3 volumes) Bibliothèque des arts (Lausanne, 1978)
Vues sur Rimbaud (Fata Morgana)
© Mermed