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Effleurements livresques, épanchements maltés

J'ai écrit et j'écris les textes de ce blog; beaucoup sont régulièrement publiés en revues; j'essaie de citer mes sources, quand je le peux; ce sont des poèmes ou des textes autour des gens que j'aime, la Bible, Shakespeare, le rugby, les single malts, Eschyle ou Sophocle, la peinture, Charlie Parker ou Sibelius, la définition de l'infini de David Hilbert, les marches ici et ailleurs...Et toujours cette phrase de Halldor Laxness: 'leur injustice est terrible, leur justice, pire encore.' oliphernes@gmail.com

Le viol de Lucrèce strophes 111 - 120

Lucrèce , Simon Vouet

Lucrèce , Simon Vouet

 

'O hateful, vaporous, and foggy night!
Since thou art guilty of my cureless crime,
Muster thy mists to meet the eastern light,
Make war against proportion'd course of time!
Or if thou wilt permit the sun to climb
His wonted height, yet ere he go to bed,
Knit poisonous clouds about his golden head.

 

'With rotten damps ravish the morning air;
Let their exhal'd unwholesome breaths make sick
The life of purity, the supreme fair,
Ere he arrive his weary noontide prick;
And let thy misty vapours march so thick,
That in their smoky ranks his smother'd light
May set at noon and make perpetual night.

 

'Were Tarquin night (as he is but night's child),
The silver-shining queen he would distain;
Her twinkling handmaids too, by him defil'd,
Through Night's black bosom should not peep again:
So should I have co-partners in my pain:
And fellowship in woe doth woe assuage,
As palmers' chat makes short their pilgrimage.

 

Where now I have no one to blush with me,
To cross their arms and hang their heads with mine,
To mask their brows, and hide their infamy;
But I alone alone must sit and pine,
Seasoning the earth with showers of silver brine,
Mingling my talk with tears, my grief with groans,

Poor wasting monuments of lasting moans.

 

'O night, thou furnace of foul-reeking smoke,
Let not the jealous day behold that face
Which underneath thy black all-hiding cloak
Immodesty lies martyr'd with disgrace!
Keep still possession of thy gloomy place,
That all the faults which in thy reign are made,
May likewise be sepulchred in thy shade!

 

'Make me not object to the tell-tale day!
The light will show, character'd in my brow,
The story of sweet chastity's decay,
The impious breach of holy wedlock vow:
Yea, the illiterate, that know not how
To cipher what is writ in learned books,
Will quote my loathsome trespass in my looks.

 

'The nurse, to still her child, will tell my story
And fright her crying babe with Tarquin's name;
The orator, to deck his oratory,
Will couple my reproach to Tarquin's shame:
Feast-finding minstrels, tuning my defame,
Will tie the hearers to attend each line,
How Tarquin wronged me, I Collatine.

 

'Let my good name, that senseless reputation,
For Collatine's dear love be kept unspotted:
If that be made a theme for disputation,
The branches of another root are rotted,
And undeserved reproach to him allotted,
That is as clear from this attaint of mine
As I, ere this, was pure to Collatine.

 

'O unseen shame! invisible disgrace!
O unfelt sore! crest-wounding, private scar!
Reproach is stamp'd in Collatinus' face,
And Tarquin's eye may read the mot afar,
How he in peace is wounded, not in war.
Alas, how many bear such shameful blows,
Which not themselves, but he that gives them knows!

 

'If, Collatine, thine honour lay in me,
From me by strong assault it is bereft.
My honey lost, and I, a drone-like bee,
Have no perfection of my summer left,
But robb'd and ransack'd by injurious theft:
In thy weak hive a wandering wasp hath crept,
And suck'd the honey which thy chaste bee kept.

 

 

 

 

‘Nuit de haine et de ténébreux brouillards remplie !

convoque tes brumes vers la lumière de l’orient,

coupable de mon crime incurable, toi aussi,

fais donc la guerre au cours prévisible du temps !

si tu permets la montée du soleil avant

qu'il ne retrouve sa couche comme à l‘accoutumé,

ceins sa tête d’or, de nuages empoisonnés.

 

‘Charme l'air du matin de fétides humidités;

que leur haleine empestée contamine ainsi

la beauté par excellence, la vie de pureté,

avant qu’il arrive à son étape de midi;

et que tes vapeurs de brumes marchent en rangs fournis,

qu’étouffée dans leurs fumées sa lumière

s'éclipse à midi pour être nuit stationnaire.

 

‘Si Tarquin (il n’est que le fils), était la nuit,

il outragerait la reine d'argent illuminée;

ses femmes flamboyantes, elles aussi violées par lui,

n'iraient plus au sein noir de la nuit le scruter:

j'aurais des compagnes tout comme moi affligées:

les malheurs sont plus doux quand on les partage,

le babil des pèlerins écourte le pèlerinage.

 

‘Plus personne pour rougir avec moi aujourd’hui,

se croiser les bras, pencher la tête humblement,

se voiler le front et cacher son infamie;

je dois rester seule et pleurer dans l‘isolement,

apportant à la terre l’or de mes larmes d’argent,

mêlant larmes et paroles, griefs et gémissements,

d'une plainte éternelle, l’éphémère monument.

 

 

O nuit ! fournaise aux gaz venimeux,

ne laisse pas le jour jaloux voir cette face

qui, sous ton manteau, à l’abri des yeux,

reste impudique martyr de la disgrâce !

garde ton royaume des ténèbres en place,

que les fautes commises sous ton magistère

puissent être inhumées avec tes chimères !

 

‘Ne m'expose pas au cancan journalier !

la lumière sera, gravée sur mon front,

l'histoire du déclin de la chasteté,

viol impie des liens sacrés de l‘union:

oui, celui qui n’a pas l’érudition

pour les mots des livres savants, verra dans

mes regards mon blasphème consternant.

 

Pour calmer l’enfant, la nurse contera mon histoire,

effrayant ses pleurs avec le nom de Tarquin.

L'orateur, en quête de beaux effets oratoires,

m’accusera en montrant l’infamie du coquin;

les ménestrels, mettant des notes sur mon destin,

captiveront l’auditoire par toutes leurs comptines

qui disent comme Tarquin m‘a trompé, moi Collatine.

 

‘Que ma renommée, cette vaine réputation

reste sans tache pour l’amour de mon époux chéri:

si elle devient un sujet de dissension,

les rameaux d'une autre racine sont pourries,

et il subira des reproches immérités, mon mari

qui est aussi innocent de cette souillure

que moi hier encore pour Collatin j'étais pure.

 

‘O honte indiscernable! invisible laideur;

cicatrice déshonorante, plaie non ressentie !

Collatin a le visage du déshonneur

l'œil de Tarquin peut lire de loin cette marque ci

reçue en temps de paix, pas en temps de conflit.

Combien sont-ils qui arborent honteusement ces plaies

que tous ignorent sauf celui qui les infligeait !

 

Collatin, si ton honneur j’en suis la maison, 

un assaut énergique me l‘a dérobé.

Mon miel est perdu, je ne suis plus qu’un frelon,

il ne me reste rien des richesses de l’été,

dont un larcin et un saccage m‘ont dépouillée:

dans ta ruche s'est repue de miel une guêpe errante,

ce miel que gardait ton abeille innocente.

à suivre

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