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Effleurements livresques, épanchements maltés

J'ai écrit et j'écris les textes de ce blog; beaucoup sont régulièrement publiés en revues; j'essaie de citer mes sources, quand je le peux; ce sont des poèmes ou des textes autour des gens que j'aime, la Bible, Shakespeare, le rugby, les single malts, Eschyle ou Sophocle, la peinture, Charlie Parker ou Sibelius, la définition de l'infini de David Hilbert, les marches ici et ailleurs...Et toujours cette phrase de Halldor Laxness: 'leur injustice est terrible, leur justice, pire encore.' oliphernes@gmail.com

Le nom de la rose

Le nom de la rose

Lire ce livre, c'est un peu comme avoir une paire de lunettes à travers laquelle on peut regarder l'histoire de l'homme. Il explique comment le monde européen, après la crise brutale de l'Empire romain, a réussi à récupérer un moment tragique mais pas aussi mauvais qu'on nous l'a longtemps représenter, l'époque médiévale. 

Ce roman n'a plus besoin d'être présenté, Le Nom de la rose est un best-seller international depuis plus de quarante ans. Il est connu du grand public également grâce à l' adaptation cinématographique de Jean-Jacques Annaud , qui s'est servi de la scénographie de Dante Ferretti et de la direction historique du médiéviste Jacques Le Goff, ainsi que de l'excellente interprétation de Sean Connery dans le rôle du héros. Rett. Situé dans un monastère bénédictin du nord de l'Italie, l'histoire se déroule sur sept jours à la fin de l'année 1327, à cette époque dont Eco disait qu'il était comme son imagination quotidienne. Les protagonistes sont le frère Guillaume de Baskerville et le novice Adso de Melk, venus au monastère pour participer à une rencontre entre les franciscains et les émissaires pontificaux avignonnais sur le thème de la pauvreté dans l'Église. Pendant leur séjour, ils se retrouvent témoins et enquêtent sur une série de meurtres qui semblent suivre les sept Trompettes de l'Apocalypse, et finissent par révéler un secret mortel gardé dans le cœur labyrinthique du monastère. Roman historique, théologique, philosophique, roman policier : le nom de la rose est un peu tout cela et sa grandeur est d'être un texte savant et populaire à la fois , sans contradiction dans cette dichotomie. Ceci est rendu possible grâce aux multiples niveaux de lecture qu'il propose aux lecteurs, qu'ils soient intéressés par l'aspect plus romanesque du texte ou par celui plus proprement philologique.  Le Nom de la Rose se termine par une phrase en latin : "Stat rosa pristina nomine, nomina nuda tenemus" (La rose primitive n'existe que dans le nom, nous ne possédons que des noms nus). Eco lui-même a nié qu'il ait voulu retrouver Shakespeare: "Une rose de n'importe quel autre nom sentirait aussi bon":dans ce vers Shakespeare dit que les mots ne comptent pour rien et que la rose serait une rose quel que soit le nom que nous avons donné. Eco soutient que lorsque les choses n'existent plus, seuls les mots restent, donc à la fin de la vie d'une rose, ce qui reste est le nom de l'universel.

L'idée du Nom de la Rose m'est venue presque par hasard et je l'ai aimé car la rose est une figure symbolique tellement chargée de sens qu'elle n'en a presque plus : rose mystique, et la rose a vécu ce que vivent les roses, la guerre des deux roses, une rose est une rose est une rose, les Rose-Croix, merci pour les roses magnifiques... Un titre doit brouiller les idées, pas les régimenter” nous dit Umberto Eco.

Je suis d'accord avec ceux qui disent que ce roman devrait être proposé comme lecture dans les écoles . D'abord parce que la structure est celle d'un roman d'investigation, ce qui le rend très agréable et captivant , élément essentiel pour impliquer les enfants. Umberto Eco lui-même soutenait que « malgré tout, un roman doit divertir aussi et surtout par l'intrigue ». Et Le Nom de la rose y réussit très bien, avec ce mélange de mystère, de suspense et d'enquêtes déductives qui rappellent le polar  de la meilleure tradition anglo-saxonne et maintiennent l'attention et la curiosité du lecteur jusqu'au bout. 

Le protagoniste Guillaume de Baskerville reprend par son nom et son sens de l'investigation, Sherlock Holmes d'Arthur Conan Doyle. Cet hommage est également renforcé par la présence d'une sorte de Dr Watson dans la figure d'Adso (notez l'assonance des deux noms), qui joue le rôle de narrateur a posteriori des événements. Ces échos « conandoyliens » explicites contribuent à la popularité du roman, car ils sont reconnaissables et appréciés du grand public.

De plus, Le Nom de la rose est un livre qui, avec une précision maniaque mais un naturel apparent, nous transporte à la fin du Moyen Âge et nous le fait connaître intimement , nous offrant une fresque rigoureuse des coutumes et des croyances d'une époque fascinante mais controversée, en à certains égards sombre mais en même temps plein de ces idées intellectuelles qui conduiront à l'humanisme et à la Renaissance. 

Et il le fait mieux qu'un manuel scolaire ne le pourrait jamais.

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