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Effleurements livresques, épanchements maltés

J'ai écrit et j'écris les textes de ce blog; beaucoup sont régulièrement publiés en revues; j'essaie de citer mes sources, quand je le peux; ce sont des poèmes ou des textes autour des gens que j'aime, la Bible, Shakespeare, le rugby, les single malts, Eschyle ou Sophocle, la peinture, Charlie Parker ou Sibelius, la définition de l'infini de David Hilbert, les marches ici et ailleurs...Et toujours cette phrase de Halldor Laxness: 'leur injustice est terrible, leur justice, pire encore.' oliphernes@gmail.com

Gérard de Nerval

Gérard de Nerval

En avant, marche!

 

En avant, marche!...Amis, c'est notre cri d'attaque,

De départ, de conquête...Il a retenti loin :
Aux plaines blanches du Cosaque,
Aux plaines jaunes du
Bédouin!

Les peuples nos voisins l'ont dans l'oreille encore,
Car, sous le drapeau tricolore,
Il les guida contre le czar,

Lorsque leurs légions à nos succès fidèles

De l'aigle immense étaient les ailes,
Le jour d'Austerlitz... et plus tard.

La Grande Armée enfin se remet en campagne !
Accourez, Nations, sous sa triple couleur,

Que la Liberté joue et gagne

La revanche de l'empereur!
En avant, marche!...
Est-il une cause plus belle?

La Pologne encor nous appelle,

Il faut écraser ses tyrans !
Une neige perfide en vain ceint leurs frontières...

Prenons le chemin que nos frères

Ont pavé de leurs ossements!...

En avant, marche ! la Belgique !
Toi, notre sœur de liberté,
Viens pour cette guerre héroïque
La première à notre côté !

Et, si tu sais dans quelle plaine
Un jour dix rois ivres de haine
Ont voulu pousser au tombeau
La France lâchement frappée...,
Aiguise en passant ton épée
Au monument de
Waterloo!

En avant, marche! l'Italie!
Les sépulcres de les héros,
Alors que la liberté crie,
Ont de magnifiques échos :
Longtemps tu leur fermas l'oreille;
Mais, puis qu'enfin tu te réveilles,
Viens, ton opprobre est effacé!...
Ce jour aux vieux jours se rattache,
Et les vivants ne font plus tache
Au sol glorieux du passé!

En avant, marche! l'Allemagne!
Hourra ! les braves écoliers !
Par la cendre de
Charlemagne!
Voulez-vous être les derniers?
Les âmes sont-elles glacées
Au pays des nobles pensées
Et de la foi des anciens temps?...
Non! noire feu s'y communique,
Et le vieux chêne teuton ique
Reverdit avant le printemps!

Sommes-nous là tous?.'..
Déjà brille Pour nous accompagner toujours

Le beau soleil de la Bastille

Et d'Austerlitz et des trois jours?

Marchons ! la voici reformée

Après quinze ans, la Grande Armée!...

Mais à des succès différents
Quoique la liberté nous mène,...
Pour l'ombre du grand capitaine,
Laissons un vide dans les rangs!

Ah! ah! la route est belle, et chère à notre gloire...
Toutes les plaines, là, sont des pages d'histoire;
Mais combien de Français y sont ensevelis!...
Oh! pourtant nous aurons l'âme joyeuse et fiêre.
Quand nos pieds triomphants fouleront la poussière
D'Iéna, de Friedland, d'EssIing ou d'Austerlitz!

Puis, avant d'arriver jusqu'à l'empire russe,
Nous pousserons du pied et l'Autriche et la Prusse,
Tuant leurs aigles noirs qui semblent des corbeaux;
Et nous rirons à voir ces vieilles monarchies
Honteuses, choir parmi leurs estrades pourries,
Leurs tréteaux vermoulus et leur pourpre en lambeaux!

Et, l'apercevez-vous, mes amis, qui sans cesse
Sur la pointe des pieds, haletante, se dresse...
La Pologne... pour voir si nous n'arrivons pas?...
Enfin notre arc-en-ciel à l'horizon se montre : ...
Ah! le voyage est long, frères, quand on rencontre
Un trône à renverser sous chacun de ses pas !

Nous voici!...
Dans nos rangs vous savez votre place,

Braves de Pologne, accourez!
Maintenant, attaquons dans ses remparts de glace

Le géant et marchons serrés!
Car il faut en finir avec le despotisme :

Ceci, c'est une guerre! et non
De ces guerres d'enfant où brillait l'héroïsme

De Louis Antoine de Bourbon ...

Mais une guerre à mort! et des bal ailles larges

Avec des canons par milliers!
Où viendront se heurter en effroyables charges

Des millions de cavaliers!
Guerre du chaud au froid, du jour à l'ombre... Guerre

Où le ciel dira ses secret
Et telle qu'à coup sûr les peuples de la terre

N'en oseront plus faire après!
Là, quinze ans de vengeance entassée et funeste

Éclateront comme un obus,
Et coucheront à bas plus d'hommes que la peste

Ou que le choléra-morbus

Là, le sang lavera des affronts sanguinaires,

Et sur nos bataillons épars,
Nous croirons voir toujours les ombres de nos frères

Flotter comme des étendards!

II

Que dis-je? hélas! hélas!
Tout cela, c'est un rêve,

Un rêve à jamais effacé!...
L'autocrate est vainqueur... le niveau de son glaive

Sur notre Pologne a passé!
C'est en vain, qu'à la voir tomber faible et trahie,

La honte nous montait au cœur:
En vain que nous tendions de toute sa longueur

La chaîne infâme qui nous lie!...
Mais c'est fini!...
L'éclat dont notre ciel brillait

S'évanouit... le temps se couvre,
La gloire de la
France est enterrée au
Louvre

Avec les martyrs de Juillet ...

Une vieille hideuse à nos yeux l'a tuée,

Vieille à l'œil faux, aux pas tortus,

La Politique enfin, cette prostituée
De tous les trônes absolus!

Oh! que de partisans s'empressent autour d'elle!

Jeunes et vieux, petits et grands,
Inamovible cour à tous les rois fidèle,

Fouillis de dix gouvernements;
Avocats, professeurs à la parole douce,

Mannequins usés aux genoux,
Tout cela vole, et rampe, et fourmille, et se pousse

Tout cela pue autour de nous!...

C'est pourquoi nous pleurons nos rêves politiques,

Notre avenir découronné,
Nos cris de liberté, nos chants patriotiques!...

Leur contact a tout profané!
Notre coq, dont ils ont coupé les grandes ailes,

Dépérit, vulgaire et honteux;
Et nos couleurs déjà nous paraissent moins belles

Depuis qu'elles traînent sur euxl

Oh! vers de grands combats, de nobles entreprises,

Quand pourront les vents l'emporter,
Ce drapeau conquérant, qui s'ennuie à flotter

Sur des palais et des églises !
Liberté, l'air des camps aurait bientôt reteint

Ta robe, qui fut rouge et bleue...
Liberté de juillet! femme au buste divin,

Et dont le corps finit en queue !

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